Le cas « Swiss Avia Consult Sàrl » / « Avia SA » (Arrêt 4A_630/2018 du 17 juin 2019) est l’occasion de revenir sur la notion de risque de confusion en droit des raisons de commerce et des noms de domaine.
Quelques mots à propos des protagonistes :
Qu’en est-il des faits ?
Au printemps 2015, les sociétés plaignantes ont communiqué à Swiss Avia Consult Sàrl qu’elle portait atteinte à leur raison sociale : elles lui ont demandé de changer de raison de commerce et de cesser toute utilisation de l’élément « Avia ».
En août de cette même année, les plaignantes ont déposé devant le Tribunal cantonal de Fribourg une action en prévention et en cessation de l’atteinte fondée sur les articles 951 et 956 du Code des Obligations relatifs aux raisons de commerce. Le Tribunal cantonal leur a donné raison. Refusant la décision de l’autorité cantonale, Swiss Avia a formé un recours auprès du Tribunal fédéral, mais en vain.
Dans ce billet, nous allons nous pencher sur la question du risque de confusion telle qu’elle a été traitée par le Tribunal fédéral. Concernant la question de la péremption soulevée par la recourante, nous vous invitons à prendre connaissance de la consid. 3 de l’arrêt.
Dans leurs conclusions rédigées en 2015 et complétées en 2017, les plaignantes affirmaient que seul l’élément « Avia » était doté d’un caractère distinctif dans la raison de commerce de la défenderesse, ce qui pouvait amener le public à concevoir à tort un lien avec le groupe Avia.
Que dit la loi ?
En vertu des articles 951 et 956 du Code des Obligations, il est interdit d’utiliser une raison de commerce identique ou similaire susceptible de créer un risque de confusion avec une raison antérieure. On distingue deux types de confusion :
Pour savoir si deux raisons de commerce se distinguent « nettement », l’impression d’ensemble produite par les différents éléments est un critère décisif. Selon la jurisprudence, ce sont surtout les « éléments frappants » par leur signification ou leur sonorité qu’il faut prendre en compte. Les désignations de fantaisie font généralement partie de ces « éléments frappants », c’est-à-dire dotés d’une force distinctive importante. Ce qui n’est pas le cas des désignations génériques, relevant du domaine public.
Quelle a été la décision finale ?
Le Tribunal fédéral a confirmé l’existence d’un risque de confusion indirecte, confusion engendrée par l’utilisation commune du terme « Avia » dans les raisons des parties. Cette décision s’appuie sur les arguments suivants :
Dans leurs conclusions, les sociétés du groupe Avia avaient exigé l’interdiction du signe « Avia » à la défenderesse pour sa raison sociale et, subsidiairement, la radiation de son nom de domaine : « swissaviaconsult.ch », qui contenait le signe litigieux.
Que dit la loi ?
En tant que signes distinctifs (au même titre que les raisons de commerce et les marques – ATF 126 III 239 consid. 2b), les noms de domaine doivent se distinguer suffisamment des signes appartenant à des tiers afin d’éviter tout risque de confusion. En outre, si le signe utilisé comme nom de domaine est protégé par le droit des raisons de commerce, son titulaire est en droit d’interdire aux tiers l’utilisation de ce signe comme nom de domaine. Ainsi, Avia SA et sa société sœur étaient en droit d’exiger de Swiss Avia Consult Sàrl d’abandonner son nom de domaine.
Quelle a été la décision finale ?
Le Tribunal fédéral a abondé dans ce sens, en se basant principalement sur l’argument suivant :
L’appréciation du risque de confusion entre un nom de domaine et une raison de commerce doit tenir compte de l’adresse du site web et non pas de son contenu, car c’est l’adresse qui suscite d’abord l’intérêt du public.
Le Tribunal fédéral en a conclu que la confirmation d’un risque de confusion entre les raisons de commerce conduisait à admettre également ce même risque entre la raison sociale des intimées et le nom de domaine de la recourante.
Swiss Avia Consult Sàrl est ainsi devenue Swiss Avion Sales LLC : la seule comparaison des éléments permet d’affirmer qu’il n’y a plus aucun risque de confusion avec les sociétés du groupe Avia.
Quand on crée une société, il faut s’assurer que la raison sociale choisie soit disponible [hyperlien : « Création de société : comment choisir et protéger son nom d’entreprise ? »] et non susceptible de créer une confusion avec un signe distinctif antérieur. Pour se prémunir contre ce type de conflit, une recherche de similarités approfondie est nécessaire. Avec Legal Nota [hyperlien], cette recherche peut être réalisée en quelques clics !